De nombreuses écoles se réclament de la psychanalyse. Souvent pour s’ériger en garantes qui de l’essence des théories de Freud, son fondateur, qui de Lacan, qui s’en veut le continuateur, qui de Jung, le « dissident », etc.
Chez les gardiens du temple, toute parole nouvelle semble avoir peine à se frayer un passage. Ainsi pour la trangénérationnalité. Comme le rappelle René Kaès (Transmission de la vie psychique entre générations », p19), ce n’est pas un hasard si de nombreux textes exprimant des intuitions anciennes de Freud à ce sujet restent encore non traduits, voire non exhumés). Peu de freudiens orthodoxes les mentionnent et, a fortiori, ne les ont introduites dans leur praxis, ou du moins, pas dans la théorie
L’on peut se demander si les hypothèses (et découvertes) originales ultérieures (ou contemporaines), même s’appuyant sur le socle initial freudien, n’ont pas été souvent perçues comme des apostasies. Reich n’y avait pas échappé. Ferenczi non plus. Klein ou Winnicott, (sauf dans les deux dernières décennies) tout juste. S.Viderman encore moins. F.Dolto, guère plus. Maria Torok et Nicolas Abraham pas davantage. Or, si l’on veut bien s’y pencher, leurs approches ont toutes élargi notre vision et, autant qu’il soit possible, enrichi notre pratique.
Pourquoi, dans les textes qui suivent, nous inspirons-nous particulièrement de la « psychanalyse transgénérationnelle », celle, notamment, qu’ont théorisée Abraham et Torok ? (in « l’Ecorce et le noyau », 1987 )
1) Parce qu’elle permet de valider une conviction que nous partageons sur ce point précis, avec Freud : « (…) nous postulons l’existence d’une psyché collective dans laquelle s’accomplissent les mêmes processus que ceux ayant leur siège dans l’âme individuelle (…) un sentiment de culpabilité a persisté pendant des millénaires (…) se transmettant de génération en génération »…( S.F,« Le moi et le ça », 1923). (remarquons que cette assertion valide le concept d’Inconscient collectif de Jung).
2) Parce qu’elle permet à l’exercice psychanalytique et psychothérapeutique de se désengluer, et, par là-même, de se déployer, hors de l’unique terrain de ce que Balint, au sujet de la clinique freudienne se voulant orthodoxe, a nommé la « one man psychology » (M.Balint, in « le défaut fondamental »).
Laîos et Jocaste peuvent dormir tranquilles : sauf exceptions notables[1], tant chez ses théoriciens que chez ses praticiens, la psychanalyse de la majorité des continuateurs de Freud n’explore guère au-delà (ou en deça) de l’oedipe, de la « perversité polymorphe de l’enfant, et de la calamiteuse, non heuristique, « pulsion de mort » argumentée tant par A.Green que par P.Marty. Malgré les fréquentes références à ces instances transgénérationnelles que sont le Surmoi et l’Idéal du moi, nous dirons qu’elle se confine à une théorie d’inspiration essentiellement pulsionnelle et ontogénétique, plutôt que relationnelle et phylogénétique.
C. Janin, J.Laplanche J.B Pontalis,M.Neyraut, M.Brousset, etc